Nom véritable | Jacques Rodrigue |
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Aussi connu sous | Jacques Michel |
Naissance | 1941 |
Carrière professionnelle | 1957-1986, 2015 |
La vie nous réserve parfois de ces bonnes surprises. Dans le monde de la chanson québécoise, la récidive de Jacques Michel, après une absence d'une trentaine d'années, qui faisait elle-même suite à 30 ans de carrière, est sûrement une des meilleures nouvelles qui soit.
Actif au sein de formations musicales ou en tant qu'artiste solo dès son jeune âge,, Jacques Michel aura tâté de nombreux styles de musique, du rock'n roll naissant des années 50 au réquisitoire socio-politique et à la chanson d'amour, en passant par le folk-rock et les rythmes funky ou tropicaux.
À l'âge de 16 ans, le jeune chanteur guitariste originaire de Sainte-Agnès de Bellecombe, en Abitibi, s'illustre d'abord dans les salles de danse de l'Estrie et des Bois-Francs. Après les Rock'n Roll Kids puis des Midnighters, Jacques met sur pied un nouveau groupe, les Colibris, en 1960. Ce contexte lui permet enfin de chanter les auteurs français dont il raffole: Bécaud, Aznavour. Un répertoire qui distingue déjà le quatuor de la majorité des autres formations. Bientôt s'y ajoutent quelques pièces de sa composition, ce qui amène la maison de disques, Kébec, de Victoriaville, à lui faire graver un premier 45 tours regroupant deux chansons originales.
En 1963, le groupe risque une incursion du côté de la métropole et grave quelques disques pour la maison Rusticana. Ses chansons attirent l'attention de la chanteuse Muriel Millard qui l'invite à participer à son spectacle à la Comédie Canadienne, cet automne-là. À l'occasion du premier Festival du Disque, qui se tient en octobre 1965, une méprise du jury lui fait décrocher le trophée Meilleur chanteur yé-yé alors qu'il se plaît à pasticher ce style dans certaines de ses compositions.
La découverte de l'album "Blonde On Blonde" de Bob Dylan en 1966, puis un premier voyage à Greenwich Village, haut lieu du mouvement folk américain, transforment radicalement sa façon d'écrire et son approche globale de la chanson. À son retour, il s'oriente résolument vers l'écriture et rejoint bientôt la maison Apex pour laquelle il grave quelques titres, suivis d'un microsillon « enregistré en stéréophonie » et jugé quelque peu avant-gardiste, sur lequel se retrouvent les traces de cette nouvelle sensibilité: pochette aux couleurs psychédéliques, mais aussi des titres intrigants comme les "Première lettre à Charlie", "Deuxième lettre à Charlie" et l'audacieuse "Fume ta marijuana".
Jacques offre aussi des chansons à divers groupes yé-yé: les Délinquants, les Jeun'Airs, les Lutins. Il signe bientôt chez Jupiter qui grave un nouvel album psychédélique éponyme, suite logique du précédent. S'y trouvent la continuation des lettres à Charlie, "Les voyages forment la jeunesse" et une série de chansons d'influence dylanienne: "Je reviens de très loin", "Victor et moi", "Mon père et moi". Devant le peu de succès de ces ouvrages où il s'est tant investi, l'auteur compositeur se lance le défi suivant: « J'écris encore deux chansons pour moi-même. Si aucune d'elle ne remporte le succès, je cesse de chanter et me consacre à l'écriture pour d'autres interprètes ». Suit le titre "Sur un dinosaure" qui est un succès radiophonique instantané.
L'année 1969 le voit accéder au sommet des palmarès avec quatre autres de ses chansons dont "À cause d'une fleur" qui lui vaut le Prix spécial du jury au dernier Festival du disque canadien. Dans "L'enfant noir" et "Ta mère et moi", il aborde deux sujets qui sont bien loin de la légèreté ambiante des refrains populaires.
Les goûts du public changent et il est maintenant devenu acceptable qu'un chansonnier soit accompagné d'instruments électrifiés. Sur ce point, Jacques a dès le début donné l'exemple, depuis le temps des Colibris jusqu'aux Jades qui l'accompagnent alors sur disque et en tournée.
Fin 1969, l'album "Citoyen d'Amérique" renferme deux de ses oeuvres les plus célèbres qui marqueront la nouvelle décennie: "Amène-toi chez nous", Grand Prix du Festival de Spa, en Belgique, et "Un nouveau jour va se lever", deuxième prix au Festival international de la chanson populaire de Tokyo.
La situation politique et les tensions sociales que supposent un Québec occupé, suite à l'application de la Loi sur les mesures de guerre, l'amènent à lancer un nouveau cri du coeur. Ce cri prend la forme d'un septième album qui est à la fois un appel à la dignité et à la solidarité. Outre la chanson titre, "S.O.S." contient les éloquents "J'débarque" et "Debout" tandis que la pièce "Quel temps est-il" ramène sur disque le violon de Jean Carignan, artiste alors dans une période d'oubli relatif.
La période qui s'amorce sera des plus prolifiques: en un an et demie à peine, la maison Zodiaque lance quatre nouveaux albums sur le marché: "Pas besoin de frapper pour entrer", "Dieu ne se mange plus", "Jacques Michel à la Comédie" et "C'que j'ai l'goût d'dire". Soulignons l'égéniosité qui caractérise cette période dans la conception des pochettes d'albums qui sont souvent de véritables bijoux de créativité.
À cette phase d'exubérance succède un cycle beaucoup plus intériorisé dans le parcours de l'artiste. Suite au décès de son épouse, l'homme public marque un temps de répit, par besoin de repositionner sa vie personnelle. L'écriture est alors un exutoire salutaire et il présente quelques mois plus tard l'album "Migration" qui s'avère le plus grand succès de sa carrière au plan des ventes alors que la chanson "Amène-toi chez nous" refait surface au palmarès, dans une version remaniée et toute en douceur.
"Ma nouvelle saison" marque le passage chez Polydor et assure la transition vers une certaine renaissance, complètement accomplie sur "Le temps d'aimer" qui propose les nouveaux succès "Voyez-vous le temps qu'il fait" et "Rose chair de femme". Sur "Le coeur plus chaud", les musiques laissent deviner une existence et une inspiration des plus lumineuses: "Le coeur plus chaud" et "Tout un carnaval", cette dernière étant de facture purement caraïbe.
Le passage aux années 1980 est marqué par un album bilan intitulé justement "Passages". Outre la pièce titre, les chansons "Salut Léon" et "L'invitation" interpellent directement l'auditeur tandis que "Vodka Cola" ou "Un peu d'air" constituent un retour aux textes engagés, sur des thèmes chers à l'auteur, qui permettent de mesurer le chemin accompli - ou non - depuis la création de ses premiers textes.
Encore quelques 45 tours, un dernier 33 tours et la page se tourne en 1985, après un ultime "Happy Song"! Jacques Michel s'oriente alors vers la télévision où il est concepteur, co-scénariste et co-auteur des chansons pour les séries Le Village de Nathalie et Les Mini-stars de Nathalie, dont la jeune Nathalie Simard est la vedette. Un peu plus tard, on le retrouve comme auteur compositeur et interprète de la chanson thème de Sur la rue Tabaga, dont il est également co-concepteur et co-scénariste.
À l'aube de l'an 2000, il utilise les nouvelles technologies pour le projet Qui a croqué la lune, un conte musical interactif destiné aux enfants.
Ce n'est qu'en 2014, suite à une longue pause loin de la vie publique au cours de laquelle certaines de ses chansons ont refait surface par les voix de Sylvain Cossette ou des participants à la cuvée 2004 de Star Académie, que Jacques Michel se laisse tenter par un retour à la scène à l'occasion du Festival des guitares du monde en Abitibi-Témiscamingue. Celui-ci est bientôt suivi d'un retour en studio qui donne lieu à l'album "Un nouveau jour" chez Audiogram, au printemps suivant, un disque essentiellement composé de relectures de pièces de son répertoire. En trio avec les guitaristes Yves Savard et Marco Savard, il entreprend alors une tournée à caractère intimiste qui prend son élan aux FrancoFolies de Montréal.
On peut visiter le site officiel de Jacques Michel.