Nom véritable | Alice Robitaille |
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Aussi connue sous | Alys Robi |
Naissance | 1923-2011 |
Carrière professionnelle | 1930-2011 |
Toute jeune, Alice Robitaille participe à divers concours de talents amateurs avant même de débuter l'école. Elle commence à se produire sur scène professionnellement dès l'âge de sept ans, dans une revue présentée au Théâtre Capitole, à Québec. À la même époque, on peut l'entendre sur les ondes de la radio CHRC où elle chante en direct avec une assurance qui laisse deviner le calibre de la future vedette.
Adolescente, elle se rend à Montréal et joint la troupe du Théâtre National, dirigée par la dynamique Rose Ouellette mieux connue sous son sobriquet de La Poune. C'est lors de ce séjour qu'elle commence à s'intéresser sérieusement au répertoire latino-américain qui fera sa renommée sur disques et en tournée. De plus en plus populaire auprès des noctambules et des auditeurs de la station CKAC où elle se produit régulièrement en direct, elle commence à graver des 78 tours à succès au début des années 40.
Elle ne tarde pas à connaître une renommée internationale et se rend dans diverses capitales des deux Amériques et de l'Europe. Elle chante dans plusieurs langues: français, anglais, espagnol, mais sur disques elle traduit elle-même les paroles de plusieurs succès: "Le tram", puis "Brésil", "Je te tiens sur mon coeur", "Adios Muchachos" et plusieurs autres. Pendant la Deuxième guerre mondiale, sa popularité est amplifiée par l'effort qu'elle met à soutenir les conscrits canadiens qui sont expédiés en grand nombre dans les camps en Angleterre, avant d'aller au front. Lors d'un nouveau séjour en Angleterre, quelques années plus tard, elle a l'honneur de participer à la première émission télévisée de la BBC. Mais le média de masse des années 1940 demeure la radio et la Québécoise est bien sûr, une des artistes les plus en demande. On dit qu'à son apogée elle pouvait participer à 12 émissions radio par semaine. Les cinéphiles peuvent se référer au film Radio Days de Woody Allen pour avoir une idée de la fébrilité du temps. Outre ses passages aux stations de Québec et Montréal, Alys Robi sera une des invitées régulières à l'émission Let There Be Music, diffusée coast to coast depuis Toronto, sur les ondes de la CBC.
Après la guerre, elle renoue avec la chanson populaire française de Trenet "La route enchantée", Borel-Clerc "Ah! Le petit vin blanc", Piaf "La vie en rose" ou Louiguy "La danseuse est créole" tout en continuant de s'alimenter aux répertoires de Broadway et d'Hollywood. C'est d'ailleurs en se rendant dans la capitale du cinéma qu'elle est victime d'un accident de la route qui vient briser son élan et mettre fin à ses ambitions internationales.
Suite à une rupture amoureuse et à une dépression nerveuse, elle se trouve reléguée à l'écart de toute vie artistique et civile pendant cinq ans. À sa sortie de l'établissement psychiatrique où elle était internée, à Québec, en 1952, elle doit reconquérir son public et affronter les préjugés fortement ancrés dans la population du temps à l'égard de tout ce qui s'apparente à la maladie mentale.
À peine âgée de trente ans, l'ancienne idole est déjà une has been pour ses confrères du métier et pour les potineurs de tout acabit. Ce n'est qu'à la fin des années 70, avec la chanson hommage "Alys en cinémascope" de Luc Plamondon et Germain Gauthier, chantée par Diane Dufresne, qu'elle regagne sa place au fragile panthéon de la chanson populaire du Québec. Encore boudée d'une certaine partie du public, elle devient une figure emblématique du monde du cabaret, lui aussi en perte de vitesse face aux nouveaux courants musicaux, qui donne désormais le nom d'Alys à ses trophées annuels remis aux artistes du milieu qui s'y sont le plus illustrés.
En 1989, Alain Morisod, le leader de la formation suisse Sweet People très appréciée au Québec, lui offre une chanson sur mesure qui ramène sur les palmarès celle qui fut la première vedette pop internationale du Québec. La chanson et l'album "Laissez-moi encore chanter" sont un véritable tremplin pour la nouvelle carrière d'Alys qui en étonne plus d'un lors de la soirée d'inauguration du nouveau Capitole de Québec, en 1992.
Sa vie et sa carrière sont le sujet de plusieurs livres, de thèses universitaires, d'une pièce théâtrale et ont donné lieu, en 1995, à une série télévisée où le rôle d'Alys était confié à la comédienne Joëlle Morin et l'interprétation de ses chansons à Isabelle Boulay. En 1998, un documentaire était tourné par la CBC puis, suite à la demande générale, présenté en version française sous-titrée à l'antenne du réseau français de Radio-Canada.
Outre les enregistrements d'Alys Robi pour la maison RCA Victor, dont on retrouve la trace sur CD à partir du milieu des années 1990, et son album de 1989, les mélomanes convaincus ont longtemps rêvé de retrouver des captations live de celle que le tandem Dufresne-Plamondon surnommait La reine des années 40 dans "Alys en cinémascope". Le rêve se concrétise avec la parution du document "Diva" à l'automne 2005. Une nouvelle étiquette au nom évocateur, Gala, propose plusieurs prestations de la chanteuse, extraites de la série Let There Be Music dont le chef d'orchestre d'Alys, Lucio Agostini était le maître d'oeuvre. Ses chansons les plus connues ont par ailleurs fait l'objet d'un album de la "Collection Québec Info Musique", sur étiquette Experience.
C'est finalement le film à teneur biographique Ma vie en cinémascope que tournait Denise Filiatrault au début des années 2000, avec Pascale Bussières dans le rôle d'Alys, qui s'avère le plus complet hommage à celle qui fut adoubée Lady Alys. Paru en 2004, le film a le mérite, outre de présenter un récit de la vie unique de la vedette, de refléter la culture d'après-guerre. De jeunes comédiens y personnifient toute une galerie d'artistes de l'époque pré-télévisuelle comme les Olivier Guimond, Rose Ouellette, Manda Parent, Juliette Pétrie ou Jean Grimaldi.
Souffrant de problèmes de santé qui lui rendaient tout déplacement difficile, l'artiste retrouvait une énergie manifeste lorsqu'il lui arrivait de faire une apparition sur une scène, aussi modeste soit-elle. Ceux qui la connaissaient peu, tout comme ceux qui croyaient la connaître, ont eu la surprise de retrouver son interprétation de "Mes blues passent pu dans porte" sur l'album-hommage au groupe Offenbach, "Les jalouses du blues" en 2008. Quelques semaines avant son décès, fin mai 2011, elle avait eu l'occasion de retrouver plusieurs amis et admirateurs à l'occasion de son 88e anniversaire.