Nom véritable | Lucille Dumont |
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Aussi connue sous | -- |
Naissance | 1919-2016 |
Carrière professionnelle | 1935-2016 |
Lucille Dumont est encore une toute jeune fille de 16 ans quand elle participe à un concours radiophonique pour chanter, accompagnée par l'orchestre Sweet Caporal. Nous sommes en octobre 1935 et c'est avec sa maman complice, mais à l'insu de ses frères et soeurs, qu'elle dévoile sa frêle voix et sa détermination au grand jour.
Elle sera interprète et se faufilera rapidement sur les ondes radio montréalaises qui la réclament pour donner une personnalité québécoise au répertoire français qui est très en vogue à cette époque. Lucille apprécie particulièrement les chansons de Lucienne Boyer mais Léo LeSieur, pianiste, organiste et compositeur, avec qui elle étudie et qui devient son directeur musical, l'aide à s'approprier des pièces convenant mieux à son âge, dont des titres humoristiques alors fort prisées.
Les Rollande Desormeaux, Lise Roy, Muriel Millard et même Alys Robi, fort populaires sur les plateaux montréalais d'alors, auront fort à faire pour égaler la grande sympathie qu'obtient Lucille. Peu de chanteuses québécoises sont en effet aussi douées pour l'animation. Les réalisateurs lui proposent de nombreux passages dans des émissions dont Refrains d'hier et d'aujourd'hui, Rêverie, Franco Swing, Variétés françaises, Sur les boulevards, Le moulin qui jazze, Le p'tit bal des copains, Connaissez-vous la musique?, Tambour Battant et Hier, aujourd'hui.
C'est lors d'un gala, en 1945, que Lucille Dumont crée "Insensiblement" de Paul Misraki, chanson qui sera popularisée par Jean Sablon. Le chef d'orchestre français Ray Ventura qui dirige l'orchestre, la remarque alors et lui offre immédiatement la possibilité de la produire en France. La réflexion sera de courte durée puisque l'artiste choisit plutôt de demeurer au Québec et de donner suite à son projet de mariage avec le commentateur sportif de Radio-Canada Jean-Maurice Bailly de qui elle aura deux garçons dans les années qui suivent.
Mais la carrière québécoise va toujours très bien pour celle qu'on appellera bientôt la Grande dame de la chanson même si elle n'est qu'à l'aube de la trentaine, avec ses quinze ans de carrière. Ce titre lui pesa tout de même passablement, à cause de sa connotation négative qui pouvait la faire paraître hautaine et distante pour une partie du public qui confond timidité et snobisme.
Personne distinguée et affable, Madame Dumont croit fermement qu'il faut être habitée par la chanson tout autant que l'habiter profondément pour être une bonne interprète appréciée de la population. En 1947, elle devint d'ailleurs la première chanteuse à ravir le titre fort convoité de Miss radio, élue grâce au vote populaire.
Dès l'arrivée de la télévision, en 1952, on lui offre bien entendu de grandes émissions où la chanson est reine comme Café des Artistes où elle partage l'écran avec Jacques Normand, Paul Berval et Gilles Pellerin, suivie par Feux de joie, Frères d'Armes et À la romance, émission du samedi soir diffusée en direct, entre la fin du match de hockey et les informations, avec une cote d'écoute très importante.
Dans les années quarante et cinquante, Lucille Dumont enregistre une vingtaine de 78 tours à deux titres avec un bon nombre de créations, donnant ainsi une bonne visibilité aux jeunes auteurs-compositeurs, mais aussi des reprises de chansons étrangères dont "Les feuilles mortes", "Boléro" et "Clopin clopant". En 1957, elle remporte en outre le Grand prix de la chanson canadienne avec une superbe composition de Jacques Blanchet, "Le ciel se marie avec la mer", qui devient un énorme succès. Une marque de commerce pour Dumont.
L'interprète et animatrice poursuit une carrière au petit écran, tant à la télé publique que privée, avec des missions comme Entre vous et moi, Lucille Dumont reçoit, Histoire d'une étoile et Le temps d'aimer. Elle y chante de plus en plus de titres composés par ses compatriotes (Venne, Calvé, Vigneault) et y reçoit les plus grands noms de la scène internationale comme les Jacques Brel, Enrico Macias, Fernandel, Juliette Greco et Charles Trenet.
Après plus de trente ans de carrière, peu attirée par la scène et traumatisée par son divorce hyper médiatisée, Lucille Dumont se questionne sur son avenir. C'est alors qu'elle choisit l'enseignement et fonde, en 1968, L'Atelier de la chanson où elle prodigue de précieux conseils sur l'art vocal et les techniques du métier aux plus jeunes qui ont tout à apprendre. Sylvain Lelièvre, Diane Juster, et Marie-Denise Pelletier, entre autres, profitent, à leurs débuts, de son savoir et de sa générosité.
Après cinquante ans de carrière, au milieu des années quatre-vingt, Radio-Canada lui offre un grand spécial télé qui s'amorce avec une création de Luc Plamondon et Diane Juster intitulée "Immortelle", comme la musique qui lui va magnifiquement. Cette chanson ne sera hélas pas commercialisée.
Si Lucille Dumont regrette un peu de n'avoir gravé que deux albums qui n'ont pas eu de grands succès de ventes, sa double carrière d'interprète attachante et d'enseignante dévouée et rigoureuse l'a comblée profondément.
Au cours des dernières années, elle a reçu plusieurs récompenses et hommages fort mérités dont l'Ordre national du Canada et l'Ordre national du Québec. De nombreux artistes du Québec ont célébré son apport remarquable à la culture populaire des 75 dernières années lors d'une soirée bénéfice à l'occasion du 25e anniversaire de la fondation du Chez-nous des artistes de Montréal, en septembre 2011.