Un commentaire de Roger T. Drolet
29 novembre 2008 (QIM) – Qui connaît la Corse? Cette île, terre de contrastes, située à 200 km environ au sud-est de la Côte d'Azur et qui porte des paysages époustouflants, est surnommée « l'Île de Beauté ». Avec ses 280 000 habitants se partageant moins de 9 000 km2. Une superbe contrée qui a sa langue propre, dérivée de l'italien, et des traditions millénaires.
I Muvrini, les mouflons en français (mouton sauvage des montagnes), est un duo composé des frères Bernardini qui font carrière depuis la fin des années soixante-dix. Ils nous ont fait l'honneur de venir se produire dans la cité de Champlain, dans la salle Raoul-Jobin du Palais Montcalm, ce jeudi 20 novembre.Un grand spectacle, fort bien placé, construit comme la vague qui monte puis redescend sur toute sa durée, soit plus de deux heures, avec des titres du groupe, jouant pour l'occasion en acoustique, c'est-à-dire sans grande amplification. Des pièces d'un répertoire qui aura bientôt trente ans mais qui a véritablement émergé voilà une dizaine d'années sur le continent européen, puis ailleurs dans le monde, grâce à ce métissage de mélodies traditionnelles et d'arrangements contemporains.
Les frères Alain et Jean-François Bernardini mènent le bal, mais ils sont particulièrement bien entourés de musiciens talentueux qui surgissent et disparaissent juste quand il le faut, ajoutant aux titres chantés en langue corse avec quelques phrases en français, claviers, guitares, instruments à vent (flûte, clarinette et cornemuse) et batterie. Leader de la formation, le chanteur-instrumentiste Alain Bernardini présente presque chaque morceau, intercalant ça et là des métaphores et des historiettes imagées illustrant la complémentarité entre la musique, la nature et les plus nobles aspirations de l'humanité. L'artiste réussit fort adroitement à pousser la note en entraînant le public à le suivre dans des incantations polyphoniques si caractéristiques de l'art d'I Muvrini.
Pour ce concert unique dans la Capitale, le groupe a invité l'ensemble vocal Mouv'Anse et le Choeur de la Cité sous la direction musicale de Marc-André Caron, qui a donné une amplitude particulière aux quelques dernières pièces de la représentation. Musique du monde, dit-on, pour classifier cette écho de la nature, cette force paisible émanant de la création musicale du duo qui a séduit le public, bien évidemment, mais aussi bon nombre d'artistes français et internationaux qui viennent chanter avec eux, aux hasards de la vie.
La musique d'I Muvrini est souvent aussi harmonieuse et sublime que le silence absolu. Elle renferme à la fois une énergie viscérale et une fragilité indicible, cette vulnérabilité qui unit les humains. Paradoxe? Absolument pas, car ces deux notions peuvent nous habiter totalement. De cela, j'en suis persuadé. Faites-en l'expérience. Pas étonnant que les Corses soient aussi les promoteurs du Festival de l'éco-citoyenneté Terra e Natura de Bastia qui a lieu à chaque année dans l'île française et dont l'objectif est de sensibiliser le public sur les solutions existantes pour modifier nos comportements afin de préserver notre planète.