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Tony Roman: avant-goût d'un parcours peu commun

Un commentaire de Richard Baillargeon

C'est fou mais c'est tout13 septembre 2009 (QIM) – Pendant une vingtaine d'années, de 1983 à 2002, j'ai publié sous forme de périodiques imprimés (eh oui, je suis de la génération papier) de nombreux profils d'artistes québécois des années 60. Cependant, les circonstances ne m'ont pas permis de mener une entrevue de fond avec celui qui, lors de ses passages au petit écran, avait suscité en moi un tel intérêt pour le yé-yé local. Aussi loin que je me souvienne, Tony Roman était le seul au Québec à trottiner ainsi d'un côté à l'autre du plateau de télévision, enlevant son veston d'un geste théâtral avant de s'adonner aux chorégraphies du monkey ou du sha la la!

J'avais donc réussi à obtenir – quelque part au début des années 90 – un rendez-vous sur les lieux de son travail, soit les antres d'une maison de production où Tony travaillait au prémontage d'une série destinée à la télévision de Toronto. Toujours aussi énergique et éparpillé, il m'accordait quelques secondes avant d'être appelé à quelque tâche en un autre point de la chaîne de montage, puis de revenir me raconter une anecdote pour repartir aussitôt. Visiblement, l'homme était trop ancré dans le présent pour se pencher longuement sur son passé! Après un couple d'heures de ce manège, j'avais à peine noirci un tiers de page et devais me rendre à l'évidence: le moment n'était pas favorable. Et la prochaine fois n'est jamais venue!

La parution du DC de compilation "C'est fou mais c'est tout" vient partiellement combler ce rendez-vous manqué. Outre les chansons réunies, le livret qui accompagne le disque vaut une bonne part de l'investissement! Des extraits d'une éventuelle autobiographie et autres segments, réunis par Robert Nickford et Anne Bujnowki, rappellent les débuts de l'artiste dans la troupe Zéro de conduite, sa complicité avec le génie de la pop Shadow Morton ou la genèse des chansons "Québécois" et "Aimer d'amour", un bref clin d'oeil étant accordé à la période L.A. des années 80.

Pour le fan du personnage et pour tout observateur du développement de la chanson pop québécoise, c'est hélas trop peu. Il est à souhaiter que l'un ou l'autre des projets de biographie amorcés de son vivant voie le jour. On pourrait alors en savoir davantage sur son parcours proprement musical, son engouement primitif pour cet autre pianiste-chanteur électrisant: Gilbert Bécaud, ses fréquentations artistiques (il aurait présenté le légendaire Philippe Gagnon à Robert Charlebois), sa passion pour le cinéma dont on connaît bien peu (qui se souvient de sa participation au film culte Bulldozer?), etc.

Depuis l'existence de Québec Info Musique, j'ai reçu quelques courriels de Tony, toujours sur des sujets ponctuels: une correction sur son prénom - Antoine et non Antonio - des précisions à propos de ses anciens protégés, et plus récemment une pétition de conscientisation environnementale au sujet des glaciers Toro et Esperanza au Chili, signe que l'homme avait des préoccupations autres que professionnelles. Quant à mon entrevue de fond, cela se fera dans un autre monde... À ceux qui ont été plus chanceux de prendre la parole!