Une collaboration de Jean-Marc Gaudreau
Sébastien Lépine – photo: Batiste Grison
6 novembre 2010 (QIM) – Entendre une cantate dédiée aux victimes de l'holocauste n'est peut-être pas la plus séduisante invitation que l'on puisse recevoir. Mais tous ceux qui se sont rendus à l'Église Saint Roch - si peu nombreux hélas - en ce dernier jeudi d'octobre auront découvert une oeuvre d'une majestueuse sérénité, la "Holocaust Cantata" du compositeur américain Donald McCullough.
Cette oeuvre pour soprano, baryton, choeur, violoncelle et piano, est basée sur des chants composés par des prisonniers des camps de concentration nazis. Elle fait alterner des chants et des textes parlés, récités par une dame ayant connu dans son enfance l'occupation allemande de la Belgique.
Loin de se complaire dans le pathos, comme il eut été facile de le faire, Donald McCullough nous offre une oeuvre lumineuse, qui rend hommage aux victimes tout en laissant place à l'espoir. Ainsi, pour aborder un sujet aussi délicat que les conditions de détention à Auschwitz, McCullough nous propose rien de moins qu'un tango pour violoncelle et piano. Une belle façon de célébrer la vie au sein même de ce tristement célèbre camp de la mort.
Pour cette occasion, le Festival des musiques sacrées réunissait la soprano Isabelle Huchette, le baryton Philippe Sly, l'ensemble Vocalys, le violoncelliste Sébastien Lépine et le pianiste Arturo Nieto-Dorantes. L'interprétation magistrale qu'ils nous ont offerte de cette "Holocaust Cantata" leur a valu de chaleureuses ovations.
Auparavant, nous avions eu droit à un florilège de courtes pièces sacrées propre à mettre en valeur la beauté exceptionnelle des voix de cette formation chorale trifluvienne, fondée en 1998. Des oeuvres pour la plupart d'auteurs peu connus au nom parfois imprononçable tel Haraldur Sveinbjörnsson. Des chants sacrés empreints d'une grande spiritualité et qui nous invitaient à réfléchir sur l'expérience de gens ayant vécu la guerre et ses effrois.
Tout au long de la soirée, le violoncelliste Sébastien Lépine, qui a le rare privilège de jouer sur un Stradivarius datant de 1699 et le pianiste canadien Arturo Nieto-Dorantes, proclamé meilleur pianiste mexicain de sa génération, se sont fait de magnifiques complices. Ils ont révélé la pleine mesure de leurs talents avec leurs interprétations de "Louange à l'Éternité de Jésus", extrait du "Quatuor pour la fin des temps" d'Olivier Messiaen et du "Kol Nidrei" de Max Bruch, deux pièces pour violoncelle et piano. Vivement, un concert consacré à ces deux musiciens formidables!
On peut déplorer que les notes du programme ne fassent pas mention du nom de la récitante. Ni du trompettiste dissimulé dans la nef de l'église. Celui-ci nous a offert un émouvant "Appel aux morts", pièce composée de deux solos de trompette entrecoupés par un très long silence. L'écoute recueillie du public était telle que pour un peu on aurait entendu voler un ange.
Ce concert venait nous rappeler à quel point la musique sacrée sait si bien élever l'âme.