Une collaboration de Roger T. Drolet
Mario Pelchat et Michel Legrand
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17 avril 2009 (QIM) – Ils se sont préparés judicieusement. Michel Legrand, l'un des Français les plus appréciés et respectés dans le monde a choisi Mario Pelchat pour donner d'autres couleurs à ses grandes mélodies intemporelles. Et elles sont nombreuses. Pas évident pour certains? Et pourtant... Le pianiste démarre, le chanteur monte à bord: "Les moulins de mon coeur". L'amalgame est au diapason, ce vendredi 10 avril 2009, avec quatre musiciens accompagnateurs, au grand plaisir de la salle bondée.
Calmement installé à son piano à queue, les doigts du pianiste compositeur de 77 ans s'envolent rapidement dans leurs élans jazz et le public du Capitole de Québec se trouve subjugué par un flot d'harmoniques enveloppantes auxquelles se mélangent particulièrement celles de la harpiste Catherine Michel. Sous un éclairage bleuté, des écrans de fond de scène lumineux, le duo enchaîne des pièces aux styles variés mettant en évidence cette belle complémentarité qui est le but de l'exercice.
Sans trop de surprises, les artistes enchaînent plusieurs pièces qui figurent sur le récent disque du duo (Mario Pelchat | Michel Legrand), à peine entrecoupées de quelques mots du chanteur toujours très apprécié de ses admirateurs québécois et qui se fera bientôt découvrir par une large public, fan de Legrand, lequel fera sa connaissance au cours de la tournée internationale qui s'amorce. La voix puissante et enveloppante de Pelchat, sa présence aussi, font honneur à des titres souvent chantés par les plus grands depuis une cinquantaine d'années déjà. Les Streisand, Sinatra, Minelli, Aznavour sont désormais rejoints par un Québécois de 45 ans en pleine possession de son art d'interprète. Cela sera particulièrement remarqué lors de "La valse des lilas" mais plus encore dans "Moi, je suis là", ce scat déchaîné contenant encore plus de mots que de notes. Et dire qu'il ne se croyait pas doué pour le jazz!
Mais Legrand a quand même son espace bien à lui dans cette prestation doublement signée. Consacrant une parenthèse musicale à un vieux complice, Jean Dréjeac, disparu en 2003, avec qui il a signé des titres pour nombre de vedettes, il fera trois titres au piano et au chant. Ce passage nous rappelant celui de 2006, sur cette même scène, alors qu'il combinait voix et piano. Mario revient avec l'immortelle "Un été 42", chanson-titre du film des années 70 après que la harpe ait permis aux spectateurs d'apprécier la qualité de cette mélodie.
Mais la surprise imprévisible de tous, y compris des artistes, survint subitement lorsque, pendant l'interprétation de "L'addition", jadis chantée par Yves Montand, le courant électrique s'interrompit créant une stupeur indicible ainsi que la pénombre dans la salle et sur scène. Et vlan, plus d'amplification, plus de spectacle pensa-t-on. Imaginez un peu. Phénomène rarissime mais toujours possible, est-ce que le public devrait évacuer aux 2/3 du spectacle? C'était sans compter l'ultime ravissement qui retomba sur la salle lorsque Legrand et Pelchat prirent la décision d'enchaîner plusieurs des titres prévus. On ouvre le piano à queue, Mario s'avance au bord de la très sombre scène et la magie s'installe... comme au bon vieux temps où l'amplification n'existait pas, dans ce théâtre qui fut inauguré au début du XXe siècle. Comme quoi les grands artistes n'ont nullement besoin de tous les artifices électroniques pour créer l'émotion. Le problème technique est pratiquement devenu le moment de grâce de cette représentation unique à jamais. "Les parapluies de Cherbourg" ont rarement eu un tel écho. Bien que quelques titres fussent supprimés, les amateurs sortirent ravis de cette finale impromptue et en parleront sans doute longtemps.
En première partie, la jeune Ontaroise Andréa Lyndsay, conquit facilement un auditoire qui ne la connaissait guère, avec son charme contagieux, ses chansons fraîches, son aisance et son accent enjôleur.