17 août 2004 (QIM) - Le sujet se retrouve régulièrement au fil des conversations: de toutes les versions québécoises qui furent empruntées aux nombreuses chansons des Beatles, lesquelles valaient vraiment le détour? Bien que le calibre de ces adaptations puisse varier considérablement en qualité, plusieurs ont fait leur marque et sont passées depuis des années dans la mémoire collective. Précisons que le phénomène des adaptations locales existait à l'échelle planétaire et que le Québec des années 60 était totalement en phase avec son époque. Quant à leur qualité représentative, ce n'est pas d'hier que l'on se pose la question, à Québec Info Musique. En fait, plusieurs années avant l'existence de votre site Web favori et longtemps avant même que son concept ait germé en nos esprits, l'idée d'une compilation semblable avait effleuré les mélomanes Richard Baillargeon et Roger Drolet. Cela se passait en 1994, lors d'une émission spéciale célébrant le 30e anniversaire de l'arrivée des Beatles en Amérique, émission diffusée sur les ondes de CKRL, la doyenne des stations de radio communautaires québécoises. Dix ans plus tard, grâce à la patiente initiative de l'équipe des Disques XXI et à la collaboration de tout un réseau de collaborateurs dont vos deux serviteurs, l'album "Beatles 101" voit enfin le jour. Mais laissez-nous vous raconter une chouette histoire dont le dénouement est plus que positif.
Dans les semaines et les mois qui ont suivi l'émission de février 1994, ces deux fouineurs férus de beatlemanie ont commencé le recensement des interprétations, adaptations et reprises instrumentales du répertoire des Fab 4, avec l'aide de collaborateurs de la SARMA (organisme fondé par Richard et voué à la valorisation du patrimoine québécois de l'époque yé-yé) et l'apport tout particulier du spécialiste des palmarès Michel Gignac. Le résultat de ces recherches n'allait voir son aboutissement que quatre ans plus tard, à la parution de la revue Rendez-vous 98. À cette date, on comptait près de 300 enregistrements québécois liés à l'une ou l'autre des chansons au répertoire du groupe de Liverpool ou de l'un des quatre Beatles.
Pendant ce temps, Roger mettait sur pied un regroupement qui allait donner naissance au Réseau Québécois des Amis des Beatles ou RQAB. L'idée d'une compilation de versions québécoises n'était pas loin. Elle allait même faire l'objet de diverses suppositions. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres et une telle entreprise méritait d'être menée de façon professionnelle et surtout en respectant les règles de l'art. Tout le volet légal, l'accès aux enregistrements originaux, la fabrication et une distribution adéquate relèvent d'un véritable défi et demandent l'apport de ressources bien implantées. En deux mots, y aurait-il une maison de disques qui serait intéressée à tenter le coup? Il était clair au départ que la réalisation d'une telle compilation demandait des moyens technologiques de pointe, une expertise à chaque étape de la production et un réseau de distribution établi. Cette maison de disque s'est avérée être les Disques XXI, maison spécialisée avant tout dans la réédition et la compilation d'archives du disque québécois depuis les débuts de l'enregistrement.
Au cours des dernières années, XXI a montré un intérêt prononcé pour le corpus beatlesque, il n'est qu'à penser aux enregistrements de la Schola Musica (choeur interprétant les Beatles en grégorien) ou de Catherine Lambert. À peine quelques discussions au sommet et l'équipe était convaincue de la justesse du projet. Les diverses pistes visant à retracer les bandes originales menaient à un autre acteur de premier plan dans la préservation des archives sonores des décennies passées. Denis Pantis avait lui-même réédité plusieurs de ces titres sur étiquette Mérite, à partir de la fin des années 90. Il ne tarde pas à se joindre à la démarche des artisans de XXI, Martin Duchesne et Michel Laverdière, tout en apportant un éclairage nouveau au projet. "Beatles 101" pouvait se mettre en chantier. De nouvelles bandes sont bientôt retrouvées, des titres jamais parus sur DC, quelques versions stéréo sont même complètement inédites. Il aura fallu près de deux ans avant de réunir toutes les conditions favorables au présent aboutissement, à l'été 2004, juste à temps pour souligner le 40e anniversaire de cette date magique entre toutes: le 8 septembre 1964, la seule véritable journée Beatles au Québec.
Voyons maintenant de plus près: la pochette de l'album, ses couleurs, rappellent sans aucune hésitation la propre compilation des Beatles: "1". La présentation avec double boîtier peut sembler intrigante pour un album simple. La réponse à cette question ne tarde pas à jaillir au grand jour dès l'ouverture du coffret. Outre le disque lui-même où l'on retrouve 22 reprises, dans la langue de Félix, par autant d'interprètes différents, de Pierrette Roy qui fut la première à chanter Lennon-McCartney chez nous, en 1963, à Catherine Lambert "Beatles 101" contient deux livrets d'une trentaine de pages chacun, remplis de cette douce folie qu'on nommait la beatlemanie.
Le premier livret concerne le DC proprement dit: présentation de la démarche, appréciation historique, commentaires situant chacune des pièces, sans oublier les photos de chaque interprète et de nombreuses étiquettes de 45 tours! Vous n'avez que l'embarras du choix: Sultans, Hou-Lops, Mersey's, Sinners, Intrigantes, Bel Canto, Milady's, Baronets, Michèle Richard, Renée Martel, Claire Lepage, Patrick Zabé... 22 artistes ou groupes musicaux. On se croirait rassasiés? Il y a aussi un second livret, de photos celui-là. Mais quelles photos! Ce sont eux... les Beatles à Montréal, sur scène, en coulisse, en conférence de presse, dans les yeux des fans... grâce aux archives de journaux de l'époque et du Fonds Jean-Louis Frund aux Archives nationales du Québec. Qui est Jean-Louis Frund? C'est celui qui avait fourni les clichés du reportage de la revue mensuelle François, destinée aux étudiants québécois, dans son numéro du 15 octobre 1964!