Un commentaire de Roger T. Drolet
André Gagnon
9 avril 2011 (QIM) – Écouter jouer André Gagnon, c'est un moment de sérénité, de douceur, de tendresse. Beaucoup d'entre nous le connaissent et l'aiment depuis longtemps. Comme il se fait plus rare maintenant, le public de Québec avait une belle occasion de renouer, ce jeudi 7 avril au Grand-Théâtre de Québec et nous y étions.
Devant le grand rideau rouge de la salle Louis-Fréchette, coquetterie que de moins en moins d'artistes utilisent, la salle aux deux tiers pleine attendait patiemment celui qui a débuté sa carrière avec les Bozos, voilà plus de cinquante ans.
Visiblement ému, dans ces murs qui ont entendu ses notes un bon nombre de fois, l'artiste fait son entrée et entame son récital avec une pièce de son récent disque, "Les chemins ombragés". Il prend possession de la scène et du micro puis, en douceur, dévoilera tout au long de la représentation plusieurs anecdotes sur le cheminement de sa vie, sur sa destinée d'enfant heureux et chanceux d'avoir trouvé l'amour de sa vie, la musique.
Sa rencontre, comme accompagnateur, avec les chansonniers Ferland, Desrochers, Lévesque, Blanchet et Brousseau fut déterminante. Surtout celle avec Claude Léveillée avec qui il travaillera dix ans, qui lui a ouvert les portes d'une carrière fabuleuse, laquelle lui permit ensuite de composer, jouer et arranger une quantité phénoménale de pièces instrumentales, passant d'un style à l'autre avec une belle facilité et enregistrant des classiques, presque toujours les siens propres, dans les meilleurs studios et avec les meilleurs musiciens. Il raconte tout ça sur scène en mettant délicatement l'emphase sur les circonstances et les sources de son inspiration.
Bien entendu, impossible de résumer une telle carrière en 1 h 30 de concert, d'autant qu'il parle un moment entre chacune des mélodies choisies. On aura toute de même droit à plusieurs bijoux comme "Flashback" et "Neiges". Il insert notamment la superbe "Comme au premier jour", qui lui ouvrit littéralement les portes du Japon et de l'Orient, morceau sublime interprété par nombre de chanteurs dont Roch Voisine.
La première partie, s'achève sur un titre jamais endisqué, composé en hommage au poète espagnol Garcia Lorca, qui nous aura fait découvrir ses six musiciens discrets mais combien efficaces, dont le multi-instrumentiste Marc Beaulieu.
La deuxième moitié du concert se déroula dans la même veine, avec de petites histoires intercalées entre les pièces de ses grands disques et la toute neuve "Pour le piano de Claude" (dont vous devinez le patronyme), ainsi que la seule comportant des percussions (préenregistrées), la dansante "Wow", qui se retrouva au Billboard américain, en 1976.
Une somptueuse soirée, donnée en toute sobriété et respect pour ses admirateurs qui apprécient le pianiste à la discographie vraiment impressionnante. N'oublions pas qu'il a réussi, avant combien d'autres, à faire apprécier son oeuvre sur plusieurs continents.
En mot de la fin, pour remercier la salle, André Gagnon veut faire chanter son public. Il réussira, avec "Parlez-moi d'amour". Comme si ça devait être la dernière fois... J'espère bien que non.
P.S. Et tiens, je vous livre l'un de mes secrets: par un beau jour de l'été qui vient, vous invitez un être cher, vous filez tout droit vers Saint-Pacôme-de-Kamouraska, l'un des plus beaux villages du Québec (c'est là que tout a commencé pour André Gagnon), grimpez jusqu'au belvédère de la Croix, et profitez bien de ce moment magique, en écoutant quelques-uns de ses albums. Je vous suggère "Les Turluteries", "Mes quatre saisons", "Impressions" ou "Le Saint-Laurent". État de grâce et souvenirs immortels garantis. Foi de Roger T.